Repenser ses déplacements : une solution connectée pour les habitants du Parc naturel régional de l’Avesnois

 

Éminemment sensible, la question de la mobilité est ressortie avec une acuité particulière lors des mouvements sociaux de l’automne dernier. Après un premier volet consacré aux grands constats globaux, place aux outils et aux leviers qui permettent d’apporter des réponses efficaces sur le terrain. Rencontre avec Christophe Legroux, responsable du pôle éco-citoyenneté du Parc naturel régional de l’Avesnois , autour d’une question on ne peut plus pratique : quitte à admettre que la voiture est bien souvent nécessaire, comment aider les habitants à améliorer leur conduite et donc à réduire leurs émissions de gaz à effets de serre ?

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Quels sont les grands défis de mobilité qui caractérisent votre territoire ?

Ils sont relativement classiques pour des espaces faiblement urbanisés comme les nôtres, largement dépendants de la voiture, avec des conducteurs particulièrement sensibles aux prix du carburant. Les solutions alternatives sont limitées : les budgets des collectivités sont bien trop contraints pour permettre d’investir dans les transports collectifs de façon suffisamment forte pour répondre aux besoins de chacun. Ces différents paramètres sont indissociables de la réflexion menée par le Parc naturel autour d’une question simple : comment donner plus de mobilité aux habitants tout en réduisant la pollution ? La mise en place par la Région d’un chèque transport mensuel de vingt euros est une réponse qui relève d’une incontestable urgence sociale mais qui n’est pas pensée pour améliorer la situation sur le long terme. Nous avons donc cherché à favoriser le développement d’une nouvelle organisation de la mobilité, en associant les habitants pour en faire des alliés.My Anor My Mobility

Quel est le profil de ces habitants ?

Il est assez hétérogène. Une partie du territoire est habitée par des personnes qui vivent autour de Valenciennes et travaillent sur la métropole lilloise. Ceux-ci ont en général fait le choix d’habiter en milieu rural pour une question de qualité de vie. Une autre partie de la population, plutôt localisée dans le sud de l’Avesnois, vit dans la région où elle a grandi et où d’autres se sont installés, poussés par des prix de l’immobilier qui les privent d’un logement en métropole. Ce sont les plus sensibles aux questions de précarité énergétique.

Vous parlez d’en faire des alliés. Comment ?

Nous sommes des êtres paradoxaux dans la mesure où il ne nous suffit pas de savoir ce qu’il faudrait faire pour passer à l’action. Notre approche repose donc sur un triptyque susceptible de déboucher sur un changement de comportement : sensibiliser, outiller et donner une place d’acteurs. La solution proposée par le boîtier connecté de la start-up française WeNow nous a permis de tester cette démarche en incitant les habitants du territoire à changer leur manière de conduire et à s’engager pour neutraliser leurs émissions de CO2.  Connecté aux smartphones des conducteurs via une application dédiée, il permet pour commencer de mesurer la consommation de carburant des particuliers. Mais le véritable atout de l’application est de les former à l’écoconduite, donc de leur apprendre à réduire leur empreinte carbone en leur fournissant des informations et des conseils sur les usages les plus polluants : trajets courts, conduite heurtée…  Concrètement, cela consiste à faire d’un enjeu environnemental un jeu communautaire en attirant une communauté d’usagers dont les motivations et les contraintes se ressemblent. 

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Combien avez-vous réuni de volontaires ?

47 personnes ont participé à un test mené sur un an dans la commune d’Anor (3 500 habitants). En tout, ils ont roulé 800 000 kilomètres pour une réduction moyenne des consommations de 13 %, évitant ainsi la dispersion de 17 tonnes de CO2 dans l’atmosphère. Sur le plan budgétaire, l’économie de carburant réalisée représente 10 000 euros en tout, soit 200 euros d’économie par personne. À terme, l’objectif serait d’étendre le dispositif à tout le territoire pour faire de l’Avesnois le premier territoire de France neutre en carbone, ce qui suppose d’atteindre une masse critique de conducteurs. Cette dernière permettrait d’envisager la mise en place de solutions complémentaires comme le covoiturage, donc de faire de la voiture individuelle un maillon supplémentaire du transport en commun de demain.

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Comment parvenir à réussir ce changement d’échelle ?

Nous comptons nous appuyer dans un premier temps sur les services publics et les entreprises avec l’aide de l’État, qui est prêt à financer l’achat de 4 000 boîtiers à 100 euros pièce. Nous allons commencer par engager les salariés des sociétés privées et les agents des intercommunalités du territoire de l’Avesnois en leur proposant de mettre gratuitement à leur disposition ces boîtiers pendant un an. Les collectivités financeraient par ailleurs une somme de 8 euros par mois et par participant pour financer le fonds de compensation carbone. L’économie réalisée sur la consommation de carburant est donc entièrement au bénéfice des inscrits.

À plus long terme, comment espérez-vous voir évoluer ce dispositif ?

Le but est évidemment d’initier un projet plus large qui relève de la démocratie directe et de la participation citoyenne. Il serait par exemple possible d’imaginer des débats sur l’affectation des sommes collectivement économisées. Entreprises, habitants et collectivités partageraient d’une certaine façon la responsabilité de l’aménagement territorial.

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