Si la voiture individuelle domine encore dans nos pratiques de mobilité, les salariés français sont de plus en plus nombreux à envisager ou emprunter des modes de déplacement plus verts pour se rendre à leur travail – la notable percée du vélo au cours de l’année 2020 en est un exemple frappant. Une tendance qui place les employeurs en première ligne : 67 % de leurs collaborateurs estiment que leur entreprise a un rôle à jouer dans le développement de modes de transport plus responsables. Au point d’en faire un élément non négligeable des politiques de marque employeur ? Eléments de réponse avec trois structures aux profils très différents. 

 

1| CERDD : une problématique intégrée d’emblée

Depuis ses bureaux situés sur la Base du 11/19, le Centre Ressource du Développement Durable (Cerdd) accompagne depuis 20 ans les acteurs de la région Hauts-de-France vers de nouveaux modèles de société en les incitant à s’engager en faveur des transitions économique, sociale et écologique du territoire. Reste un détail non négligeable pour des candidats potentiels : située à l'intersection des villes de Loos-en-Gohelle, Lens et Liévin, l’ancienne base minière du 11/19 est relativement éloignée de la métropole lilloise, où vivent la quasi-totalité de ses salariés – un facteur qui pourrait en pousser certains à privilégier la voiture. Et pourtant, « pour des questions pratiques, certains pratiquent le covoiturage mais la plupart de mes collègues viennent en train depuis la métropole lilloise jusqu’à Lens, avant de finir le trajet jusqu’au site à l’aide de leur propre vélo », explique Joséphine Raynauld, chargée de mission Ressources Climat. Un trajet d’une quinzaine de minutes qui est en somme entré dans les mœurs.

Pourquoi ? D’abord parce que leur démarche est soutenue par le Cerdd, au travers d’une participation assez classique au remboursement des frais de transports doublé d’un forfait mobilité durable que le Cerdd vient de voter en assemblée générale, suite à l’entrée en vigueur de la loi LOM. Ensuite parce que la nature même des missions du Cerdd attire des profils soucieux de se déplacer de manière responsable, observe Joséphine Raynauld qui en fait valoir d’autres preuves concrètes : « Nous n’avions pas attendu la pandémie pour mettre en place le télétravail, un facteur déterminant pour réduire les émissions carbonées. » Récompensé par le prix du télétravail accordé dans le cadre du Challenge de la mobilité, le Cerdd s’est également abonné à Citiz, un système d’autopartage proposé sur Lille et Arras. « C’est une solution ponctuelle et efficace pour permettre à chacun d’assurer un rendez-vous sans avoir à envisager l’achat par le Cerdd d’un véhicule professionnel », estime Joséphine Raynauld.

 

2|Norauto : une tendance qui s’affirme

On n’associe pas nécessairement Norauto, leader français du centre-auto, à la notion d’écomobilité, et pourtant : l’entreprise, qui compte environ 5600 collaborateurs, plus de 250 centres d’entretien automobile en France et a installé son siège à deux pas de l’aéroport de Lesquin, a en effet pris le virage de la mobilité douce, explique Anne-Danièle Fortunato, Leader Développement Durable et ancienne DRH de l’entreprise : « Nous en sommes encore aux prémices, mais nous nous employons bel et bien à réduire la mobilité carbonée de nos salariés. Nous avions saisi une première opportunité avec la mise en place des anciennes indemnités kilomètres vélo (IKV), dans une double perspective. La première consistait évidemment à inciter nos collaborateurs à venir travailler à vélo, mais la seconde était aussi un moyen de mettre en avant un fait relativement peu connu : nous vendons depuis longtemps des vélos à assistance électrique dans nos magasins… Avec la loi LOM, le système des IKV s’est naturellement étendu aujourd’hui à d’autres formes de déplacements non carbonés, comme des trottinettes. »

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Depuis, l’entreprise est allée plus loin en mettant en place plusieurs dispositifs destinés à amplifier une tendance bien réelle chez les salariés du siège, comme chez les candidats. Avec des logiques différentes selon qu’on s’intéresse au siège ou au réseau, explique Anne-Danièle Fortunato. « Dans le réseau, les candidats sont encore souvent des passionnés d’automobile qui nous rejoignent pour ça. La logique est différente au siège, où travaillent des profils différents. Celui-ci se situe au cœur du Centre Régional des Transports (CRT) de Lesquin, auquel il est délicat d’accéder autrement qu’en voiture. Pour proposer une alternative à nos collaborateurs, nous avons mis en place plusieurs navettes gratuites qui permettent de rejoindre le site depuis plusieurs endroits, comme la station métro Quatre Cantons ou le centre de Lesquin. Pour les déplacements au sein du CRT, nous avons constitué une flotte de quatre vélos en libre-accès, tout en insistant particulièrement sur les notions de sécurité. Se déplacer à vélo sur un site comme celui-ci n’est pas toujours évident… ». Pas évident, mais de plus en plus nécessaire, juge l’ancienne DRH : « la question de la mobilité durable est de plus en plus souvent évoquée en entretien. Elle a même tendance à devenir incontournable pour des diplômés de Skema ou de l’IESEG, pour qui la démarche responsable d’un employeur potentiel constitue aujourd’hui un véritable facteur d’attractivité. » 

Preuve d’une tendance qui s’intensifie : dans le cadre du vaste chantier de redynamisation du CRT qu’elle vient d’engager, la MEL a lancé en début d’année le chantier d’aménagement d’une piste cyclable qui le reliera au centre-ville de Lesquin. 

 

3|Ankama : inventer pour convaincre

Avec sa collègue Béatrice Bail, Marie-Alix Laurella a pris en main en 2017 le plan de déplacement d’Ankama, l’entreprise roubaisienne spécialisée dans le jeu vidéo, le divertissement et la création numérique. Baptisé Ankamouv, il vise à promouvoir toutes les mesures mises en place pour proposer différentes alternatives à la voiture individuelle à ses salariés, explique la chargée des Services Généraux et de l'Environnement de Travail. Quitte à parier sur des opérations de communication interne décalée comme en 2017, lorsque le comité de direction et quelques salariés avaient remonté le canal de Roubaix en… paddle. 

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Portée en interne grâce au réseau Yammer, cette stratégie passe d’abord par la promotion des transports en commun : « Notre entreprise se situe à deux pas de la station de métro Alsace et à moins d’un kilomètre de la gare de Roubaix. Nous expliquons à tous les nouveaux collaborateurs qu’Ankama prend à sa charge 50 % de tout abonnement aux transports en commun ». Pour faciliter l’usage du vélo et des trottinettes, quelques aménagements ont été nécessaires : « Ankama propose un espace sécurisé pour abriter les machines des collaborateurs ». Et ça marche : « plusieurs d’entre eux ont créé un groupe de discussion Vélotaf sur YAMMER, et ils s’y échangent leurs bonnes pratiques et leurs bons plans sur le thème du vélo ». Enfin, pour inciter les salariés à emprunter moins souvent seuls leurs véhicules, Ankama a créé un groupe interne dédié au covoiturage. L’entreprise rembourse une partie de l’abonnement des salariés qui utilisent les infrastructures du parking silo payant de la Plaine Images pour recharger leur voiture électrique. La démarche porte ses fruits : en 2018, 40% des collaborateurs se rendaient au travail en métro, 10% en train, 10% à pied, 4% en vélo ou deux-roues motorisé et 3% en covoiturage, des statistiques qui surpassent la moyenne sur la MEL. 

Mais l’entreprise est allée plus loin en ciblant directement les nouveaux talents qu’elle cherche à attirer, y compris les stagiaires et les CDD. Pour faciliter leur quotidien à leur arrivée, Ankama propose à ses futurs collaborateurs venant de loin une solution temporaire de logement qui court le temps de valider la période d’essai. « Cette « Ankama House », qui regroupe 11 chambres individuelles meublées autour d’espaces communs, a l’avantage de se situer à proximité immédiate de nos locaux. C’est un véritable atout qui contribue clairement à séduire de futurs collaborateurs ». Enfin, l’entreprise s’est également dotée d’une crèche de 30 berceaux, à deux pas de ses bureaux. « C’est une manière originale de faciliter les déplacements domicile-travail qui peut aussi avoir du poids lors d’un recrutement », explique Marie-Alix Laurella.

 

Pour aller plus loin : "La mobilité durable : un atout pour l'attractivité des employeurs"

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